Faites attention à ne pas vous engager dans n’importe quel genre de relation, surtout le mariage, avec quelqu’un qui ne s’exerce pas régulièrement à faire le point sur ses propres fautes et manquements.
Qu’est-ce que je veux dire par “s’exercer” ?
Cet exercice peut prendre la forme de l’exercice de « istighfar » et de « tawba » – retourner à Dieu en état de repentance, de manière régulière (quotidienne) pour les péchés et les erreurs que nous avons commis.
Il peut prendre une autre forme, celle d’accepter ce qu’on appelle la « tarbiya », ce qui veut littéralement dire “élévation” ou “développement”. La tarbiya, c’est le mentorat d’un aîné spirituel qui peut permettre à une personne de réaliser qu’elle n’est pas parfaite, qu’elle a beaucoup de domaines où elle peut s’améliorer et qu’elle a besoin d’être constamment consciente de sa nature faillible avant de prononcer des jugements ou tirer des conclusions, de la même manière qu’elle doit être ouverte aux remarques destinées à les aider à corriger leur comportement et leur attitude.
Oui, j’ai bien dit « corriger ». Inutile de mâcher ses mots. Nous pouvons avoir tort, nous AVONS tort, même souvent. Et nous avons besoin d’être corrigés. Si nous cherchons une quelconque croissance, nous avons besoin d’admettre cette réalité.
POURQUOI C’EST IMPORTANT DANS UNE RELATION
Il est extrêmement dangereux de s’engager avec une personne qui ne perçoit pas du tout la réalité de sa nature humaine – qui implique de fait d’avoir souvent tort. C’est ce qui nous rend humains. Nous commettons des péchés. Nous avons tort. Nous ne saisissons pas toutes les dimensions d’une situation. Nous sommes limités. Nous ne sommes pas omnipotents. Nos jugements sont biaisés. Nous ne sommes pas objectifs. Nous sommes faillibles.
Nous pouvons avoir tort, nous AVONS tort, même souvent. Et nous avons besoin d’être corrigés. Si nous cherchons une quelconque croissance, nous avons besoin d’admettre cette réalité.
Nous avons nos egos, nos émotions immatures non-maîtrisées, notre compréhension incomplète des choses, notre point de vue étroit, nos qualités négatives, et le diable qui travaille contre la meilleure version de nous-mêmes pour compliquer les choses.
Celui ou celle qui n’a aucune conscience de ces forces en lui-même est bien à plaindre. Comme celui ou celle qui s’implique de manière profonde avec une telle personne et qui ensuite se retrouve toujours à recevoir critiques, blâmes, et accusations est à plaindre également. Parce qu’une personne qui ne se remet jamais en question sera toujours sûre et certaine qu’elle a raison, envers et contre tout, dans n’importe quel désaccord ou conflit. Vous vous retrouvez ensuite dans une situation insoluble avec peu de chance de vous en sortir.
Et oui, se remettre en question et reconnaître notre tendance à commettre des erreurs doit être une pratique réelle dans les faits.
Il ne suffit pas pour quelqu’un de dire pour tenter de vous rassurer en vous disant que, bien sûr,” je sais bien que je ne suis pas parfait(e)”.
Tout le monde le dit, mais peu le vivent avec conscience. C’est pourquoi on voit tant de gens faire le bilan des erreurs des autres avec un air suffisant. C’est pourquoi on voit la plupart des gens aller voir leur enseignant ou leur thérapeute pour dire combien les autres personnes dans leur vies leur ont fait du tort, combien ces personnes ne sont pas de bons conjoints, amis ou parents, sans jamais dire :
« Est-ce qu’il y a quelque chose que j’ai mal fait qui a participé à créer cette situation malheureuse ou ce conflit ? »
« Est-ce qu’il y a quelque chose en moi qui fait que je vois les choses de cette manière ? »
Ou alors
« Je ne sais pas si c’est mon propre manque d’empathie ou ma subjectivité, mais voilà ce qu’il s’est passé l’autre jour… est-ce que tu pourrais m’aider à voir la situation d’un manière plus juste et moins axée sur ma personne ? »
Le manque de mise en pratique de cet exercice de prise de conscience et de reconnaissance de nos tendances à nous tromper est la raison pour laquelle nous voyons autant de personnes qui essaient désespérément de changer leur conjoint au lieu d’essayer de se changer elles-mêmes. Elles sont tellement convaincues que tous les problèmes résident chez l’autre. J’irais même jusqu’à dire que c’est la raison numéro 1 des divorces : l’incapacité à reconnaître que la faute réside chez nous, et pas toujours chez l’autre. Et si les torts sont au minimum partagés équitablement entre les deux parties, il nous faut diriger toute l’énergie que nous mettons dans la critique de l’autre dans l’amélioration de nous-mêmes. La vérité est que ceci résoudra en fait la moitié du problème – si ce n’est sa totalité.
LA CONTRIBUTION DES RÉSEAUX SOCIAUX : UNE CROISSANCE DANS LA MAUVAISE DIRECTION
Malheureusement, c’est à travers les réseaux sociaux que s’effectue majoritairement la « tarbiya » de nos jours, et ceci en abaissant – non pas en élevant – les gens à croire des choses du genre :
« Ne doute jamais de toi, tu es bien tel que tu es, ne fais pas attention à ce que les autres pensent, continue à faire ce que tu fais et ignore les gens négatifs »
C’est ce genre d’inepties qui passe pour une “vérité” qui devient une autre force – maintenant sous la forme de culture – qui vient s’opposer à toute capacité à nous questionner nous-mêmes afin de laisser une place pour le doute dans un cas de conflit ou de désaccord.
CE DONT ON A EN RÉALITÉ BESOIN
Nous avons besoin de connaître notre nature à fauter, et notre tendance à répéter les mêmes erreurs encore et encore, afin que nous puissions réparer cette partie de nous-mêmes ou au moins en être conscients et apprendre à ne pas lui faire autant confiance !
Nous devons apprendre quelles maladies notre cœur recèle – comme l’arrogance ou l’auto-admiration – des maladies qui sans aucun doute teintent et façonnent, voire alimentent directement, nos interactions et nos pensées.
Nous avons besoin de connaître notre nature à fauter, et notre tendance à répéter les mêmes erreurs encore et encore, afin que nous puissions réparer cette partie de nous-mêmes ou au moins en être conscients et apprendre à ne pas lui faire autant confiance !
Si nous pensons qu’aucun de ces manquements et de ces erreurs intérieures n’existent en nous, nous aurons une confiance complète et téméraire en chaque opinion et chaque pensée que nous avons, sans jamais faire une pause pour se demander : est-ce que cette pensée est formée par le fait que j’ai de l’arrogance dans mon cœur ? Est-ce que c’est pour cette raison que je critique autant cette personne, ce groupe ou ce projet ? Est-ce qu’il est possible que le problème soit chez moi et non pas chez eux ?
Celles et ceux qui sont vraiment engagés dans l’exercice de se tenir soi-même responsable devant Dieu se posent non seulement ces questions mais se basent sur les réalités suivantes :
Je ne saisis pas la totalité de la situation, et encore moins la vérité.
Ma perspective est teintée par mes propres faiblesses intérieures et mes penchants négatifs qui ont tendance à ressortir quand il y a un conflit ou un désaccord.
Il y a toujours une possibilité que le diable m’influence dans cette situation en me ramenant à des présomptions négatives sur cette personne afin de créer de la division.
J’ai un égo qui aura toujours des arguments pour dire que j’ai raison et que les autres ont tort et j’ai besoin de ne pas écouter cette voix autant que j’ai l’habitude de le faire.
Et surtout :
ET SI J’AVAIS COMPLÈTEMENT TORT ?
Grâce à cette prise de conscience, un magnifique horizon s’ouvre sur un champ vert où il y a tant de place pour créer réconciliation, humilité, et terrain d’entente.
Mais sans ça… les relations se brisent tellement facilement, les gens se voient assignés des étiquettes négatives dans nos têtes et nous nous retrouvons – pleinement dans notre nature à fauter – à nous enraciner dans des conclusions comme si on possédait chaque fait de la situation et comme si nous avions une vue unique sur la Vérité. Voilà la recette pour la désharmonie et la stagnation.
N’AVALEZ PAS VOTRE PROPRE POISON
Il est effrayant de savoir à quel point on peut être aveugles et comme on peut être dangereusement sûrs de soi – en avalant notre propre poison et en le tendant aux autres – lorsque l’on refuse de s’engager dans les exercices islamiques d’introspection, d’humilité et de développement personnel.
Pas de Commentaire